Les candidats
au bac 2015 des séries générales et technologiques ont commencé à
plancher mercredi 17 juin à 8 heures sur les sujets de philosophie,
que le ministère de l’éducation nationale a rendu publics une
heure et quinze minutes après le début de l’épreuve.
Voici la
formulation officielle des sujets tels qu’ils ont été soumis.
Nous vous proposerons, à partir de ce mercredi midi, des corrigés
de l’épreuve, avec notre partenaire digiSchool.
Les
sujets du bac S
« Une
œuvre d’art a-t-elle toujours un sens ? »
« La
politique échappe-t-elle à une exigence de vérité ? »
Les élèves
ont aussi été invités à réfléchir sur un texte de Cicéron :
« Comment
peut-on prévoir un événement dépourvu de toute cause ou de tout
indice qui explique qu’il se produira ? Les éclipses du soleil et de la lune sont
annoncées avec beaucoup d’années d’anticipation par ceux qui étudient à l’aide de calculs les mouvements des astres. De fait, ils annoncent ce que la loi naturelle réalisera. Du mouvement invariable de la lune, ils déduisent à quel moment la lune, à l’opposé du soleil, entre dans l’ombre de la terre, qui est un cône de ténèbres, de telle sorte qu’elle s’obscurcit nécessairement. Ils savent aussi quand la même lune en passant sous le soleil et en s’intercalant entre lui et la terre, cache la lumière du soleil à nos yeux, et dans quel signe chaque planète se trouvera à tout moment, quels seront le lever ou le coucher journaliers des différentes constellations. Tu vois quels sont les raisonnements effectués par ceux qui prédisent ces événements.
indice qui explique qu’il se produira ? Les éclipses du soleil et de la lune sont
annoncées avec beaucoup d’années d’anticipation par ceux qui étudient à l’aide de calculs les mouvements des astres. De fait, ils annoncent ce que la loi naturelle réalisera. Du mouvement invariable de la lune, ils déduisent à quel moment la lune, à l’opposé du soleil, entre dans l’ombre de la terre, qui est un cône de ténèbres, de telle sorte qu’elle s’obscurcit nécessairement. Ils savent aussi quand la même lune en passant sous le soleil et en s’intercalant entre lui et la terre, cache la lumière du soleil à nos yeux, et dans quel signe chaque planète se trouvera à tout moment, quels seront le lever ou le coucher journaliers des différentes constellations. Tu vois quels sont les raisonnements effectués par ceux qui prédisent ces événements.
Ceux qui
prédisent la découverte d’un trésor ou l’arrivée d’un
héritage, sur
quel indice se fondent-ils ? Ou bien, dans quelle loi naturelle se trouve-t-il que cela arrivera ? Et si ces faits et ceux du même genre sont soumis à pareille nécessité, quel est l’événement dont il faudra admettre qu’il arrive par accident ou par pur hasard ? En effet, rien n’est à ce point contraire à la régularité rationnelle que le hasard, au point que même un dieu ne possède pas à mes yeux le privilège de savoir ce qui se produira par hasard ou par accident. Car s’il le sait, l’événement arrivera certainement ; mais s’il se produit certainement, il n’y a plus de hasard ; or le hasard existe : par conséquent, il n’y a pas de prévision d’événements fortuits. »
quel indice se fondent-ils ? Ou bien, dans quelle loi naturelle se trouve-t-il que cela arrivera ? Et si ces faits et ceux du même genre sont soumis à pareille nécessité, quel est l’événement dont il faudra admettre qu’il arrive par accident ou par pur hasard ? En effet, rien n’est à ce point contraire à la régularité rationnelle que le hasard, au point que même un dieu ne possède pas à mes yeux le privilège de savoir ce qui se produira par hasard ou par accident. Car s’il le sait, l’événement arrivera certainement ; mais s’il se produit certainement, il n’y a plus de hasard ; or le hasard existe : par conséquent, il n’y a pas de prévision d’événements fortuits. »
Cicéron, De
la divination,
Ier siècle
avant J.-C.
Les
sujets du bac ES
« La
conscience de l’individu n’est-elle que le reflet de la société
à laquelle il appartient ? »
« L’artiste
donne-t-il quelque chose à comprendre ? »
Le commentaire
de texte porte sur un extrait de Spinoza :
« Dans
un Etat démocratique, des ordres absurdes ne sont guère à
craindre, car il est presque impossible que la majorité d’une
grande assemblée se mette d’accord sur une seule et même
absurdité. Cela est peu à craindre, également, à raison du
fondement et de la fin de la démocratie, qui n’est autre que de
soustraire les hommes à la domination absurde de l’appétit et à
les maintenir, autant qu’il est possible, dans les limites de la
raison, pour qu’ils vivent dans la concorde et dans la paix. Ôté
ce fondement, tout l’édifice s’écroule aisément. Au seul
souverain, donc, il appartient d’y pourvoir ; aux sujets, il
appartient d’exécuter ses commandements et de ne reconnaître
comme droit que ce que le souverain déclare être le droit.
Peut-être pensera-t-on que, par ce principe, nous faisons des sujets
des esclaves ; on pense en effet que l’esclave est celui qui
agit par commandement et l’homme libre celui qui agit selon son
caprice. Cela cependant n’est pas absolument vrai ; car en
réalité, celui qui est captif de son plaisir, incapable de voir et
de faire ce qui lui est utile, est le plus grand des esclaves, et
seul est libre celui qui vit, de toute son âme, sous la seule
conduite de la raison. »
Baruch
Spinoza, Traité
théologico-politique
(1670).
Les
sujets du bac L
« Respecter
tout être vivant, est-ce un devoir moral ? »
« Suis-je
ce que mon passé a fait de moi ? »
Le
commentaire de texte porte sur un extrait d’Alexis de Tocqueville :
« Les
croyances dogmatiques sont plus ou moins nombreuses, suivant les
temps. Elles naissent de différentes manières et peuvent changer de
forme et d’objet ; mais on ne saurait faire qu’il n’y ait
pas de croyances dogmatiques, c’est-à-dire d’opinions que les
hommes reçoivent de confiance et sans les discuter. Si chacun
entreprenait lui-même de former toutes ses opinions et de poursuivre
isolément la vérité dans des chemins frayés par lui seul, il
n’est pas probable qu’un grand nombre d’hommes dût jamais se
réunir dans aucune croyance commune.
Or, il est
facile de voir qu’il n’y a pas de société qui puisse prospérer
sans croyances semblables, ou plutôt il n’y en a point qui
subsistent ainsi ; car, sans idées communes, il n’y a pas
d’action commune, et, sans action commune, il existe encore des
hommes, mais non un corps social. Pour qu’il y ait société, et, à
plus forte raison, pour que cette société prospère, il faut donc
que tous les esprits des citoyens soient toujours rassemblés et
tenus ensemble par quelques idées principales ; et cela ne
saurait être, à moins que chacun d’eux ne vienne quelquefois
puiser ses opinions à une même source et ne consente à recevoir un
certain nombre de croyances toutes faites.
Si je considère maintenant l’homme à part, je trouve que les croyances dogmatiques ne lui sont pas moins indispensables pour vivre seul que pour agir en commun avec ses semblables. »
Si je considère maintenant l’homme à part, je trouve que les croyances dogmatiques ne lui sont pas moins indispensables pour vivre seul que pour agir en commun avec ses semblables. »
Alexis de
Tocqueville, De la
démocratie en Amérique
(1840).
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